La prise en charge des victimes d'attentat

La prise en charge des victimes d’attentat

Mis à jour le 10 octobre 2022

Quand le cerveau est dépassé par un événement et n’arrive pas à ‘digérer’ les informations, on parle de syndrome post traumatique. Ce trouble peut concerner à la fois les victimes du traumatisme, et leurs proches. Comment sera déroule la prise en charge des victimes d’attentats et de leurs proches ?

Martine Iracane, psyschologue, membre de la CUMP 13, et enseignant sur le thème des psycho-traumatismes nous explique que les séquelles post traumatiques sont actuellement considérées comme un véritable problème de santé publique. Qu’il  concerne un événement violent subi brutalement, tel un attentat, l’annonce d’une maladie grave, un deuil, un accident … l’événement potentiellement traumatique peut invalider le  sujet atteint alors dans son équilibre somatique, psycho affectif  et psychosocial.

Elle précise que l’accueil médico-psychologique et l’intervention psychothérapique précoces en phase de déstabilisation psychologique aigue ou états de choc, nommées encore « réactions de stress dépassé », peuvent contribuer à prévenir l’installation d’un syndrome de stress post traumatique, et favoriser le processus plus global de réparation des sujets victimes, grâce à la reconstitution de liens psychiques et psychosociaux brutalement rompus par la rencontre avec l’événement violent.

Parmi les approches préventives et thérapeutiques préconisées, l’EMDR occupe une place de prédilection. Validée par la HAS, l’OMS (2012) et l’INSERM (2015) pour le traitement des états de stress post traumatiques, la thérapie EMDR voit le développement actuel de nouvelles déclinaisons adaptées aux évènements récents. En effet, pratiquées à proximité de l’évènement, ces approches EMDR en urgence et en post urgence, sont susceptibles de décontaminer psychiquement les sujets envahis par les éléments violents et horrifiants engrammes lors de l’expérience de confrontation à la mort physique et psychique, tels les images, les sons qui risquent dans les jours qui suivent l’exposition, de surgir à l’impromptu de leur mémoire pour les bouleverser inlassablement…

En proposant une approche précoce contenante, apaisante et fondée sur le rétablissement d’un lien d’humanité souvent détruit par la violence, l’approche EMDR précoce, entraine un profond soulagement psychologique des victimes , diminue les risques d’évolution  vers une pathologie plus  sévère et plus chronique et les aide à mobiliser ,malgré la douleur morale adaptée dans ces circonstances ,leurs capacités de ressources et de résilience pour les aider sur le chemin de la réparation psychologique.
Eva Zimmermann, psychologue, praticien EMDR, nous explique les interventions possibles auprès des victimes et de leurs proches. Dans l’immédiat (jusqu’à environ 72h), elle conseille de chercher à aider la personne à s’exprimer, à se calmer, à diminuer leurs émotions fortes, tout en sachant que ces réactions sont normales et naturelles. On peut, par exemple, faire de la psychoéducation en expliquant les réactions normales et naturelles suite à un événement à forte charge émotionnelle.
Des experts internationaux ont identifié 5 axes d’ intervention, soutenus empiriquement, qui peuvent être utilisés pour guider les interventions et la prévention : un sentiment de sécurité, du calme, un sentiment d’efficacité individuelle et collective, le sentiment d’être connecté et en lien et l’espoir (1).
Eva Zimmermann nous précise également que dans le post-immédiat (jusqu’à 3 à 4 semaines), il est possible d’utiliser des protocoles spécialisés, comme le protocole EMDR pour l’urgence, de Francine Shapiro, le protocole R-TEP ou Recent Traumatic Episode Protocole) d’Elan Shapiro, ou celui des 4 champs de Jarero et Lansch. Par la suite, le protocole EMDR standard, celui sur le trauma unique, ou le trauma récent, peut être utilisée si la mémoire est très vive et très détaillée.
De son côté, Nicolas Desbiendas, psychologue, explique que les victimes qui sont dans un état d’ « urgences psychologiques relatives » – il s’agit, par exemple, de ceux qui ont un état de choc simple, avec une verbalisation spontanée, des pleurs, une colère contrôlée…-, peuvent être aidées avec une prise en charge de groupe, comme le defusing, l’EMDR de groupe… Alors que les victimes qui se trouvent dans une urgence psychologique absolue – il s’agit de celles qui sont, par exemple, dans un état de sidération (freeze reflex), un état d’agitation aigu, une fuite panique ou une stéréotypie… , nécessitent une prise en charge individuelle spécialisée. (2)
En savoir plus sur la prise en charge des victimes d’attentat :

  • (1) Hobfoll SE, Watson P, Bell CC, Bryant RA, Brymer MJ, Friedman MJ, Friedman M, Gersons BP, de Jong JT, Layne CM, Maguen S, Neria Y, Norwood AE, Pynoos RS, Reissman D, Ruzek JI, Shalev AY, Solomon Z, Steinberg AM, Ursano RJ (2007) Five Esential Elements of immediate and mid-term mass trauma intervention : empirical evidence, Psychiatry. 2007 Winter;70(4):283-315; discussion 316-69. doi: 10.1521/psyc.2007.70.4.283.
  • (2) Intervention  » EMDR et événements récents – un protocole d’urgence  » de Nicolas Desbiendras, à Nantes, lors de la journée organisée sur le thème de  thème de « La psychothérapie EMDR, au delà du trauma ».

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