L’efficacité des interventions axées sur les traumatismes en milieu carcéral

Mis à jour le 15 juin 2022

L’efficacité des interventions axées sur les traumatismes en milieu carcéral, un article de Malik N, Facer-Irwin E, Dickson H, Bird A, MacManus D., publié dans Trauma Violence Abuse


Article publié en anglais – disponible en ligne sur le site de l’éditeur – accès payant

Résumé 


Contexte
 
Le trouble de stress post-traumatique (TSPT) est surreprésenté en prison par rapport aux populations communautaires et peut être difficile à gérer dans un environnement qui peut intrinsèquement exacerber la symptomatologie liée au traumatisme.  On sait peu de choses sur l’efficacité des interventions axées sur les traumatismes en prison et on connaît moins les facteurs qui modèrent l’efficacité de ces interventions.
 
Objectifs et méthodes
 
Nous avons examiné l’efficacité des interventions axées sur les traumatismes en prison par rapport aux contrôles en prison en utilisant des techniques méta-analytiques. Nous avons également utilisé une analyse de méta-régression pour examiner les modérateurs au niveau du traitement, de la méthodologie et des participants afin de déterminer les facteurs qui augmentent l’efficacité de ces interventions.
 
Résultats
 
Sur les 16 études éligibles pour la méta-analyse, nous avons trouvé une taille d’effet faible mais significative pour les interventions axées sur les traumatismes. Les interventions de traitement des traumatismes de phase 2 et les interventions délivrées individuellement ont conduit à des réductions plus importantes des symptômes du TSPT. Les études utilisant un contrôle de traitement actif ont donné lieu à des tailles d’effet plus petites que celles utilisant une liste d’attente ou un contrôle sans contact. La durée du traitement, la qualité de l’étude, le type de résultat et le sexe n’étaient pas des modérateurs significatifs de l’efficacité du traitement.
 
Conclusion
 
Les résultats de cette étude sont encourageants mais doivent être interprétés avec prudence. Les résultats suggèrent que les thérapies de traitement des traumatismes et les interventions individuelles axées sur les traumatismes peuvent être efficaces et appliquées avec succès en prison. Cependant, l’insuffisance des groupes de comparaison ne permet pas de tirer une conclusion ferme. Il existe un besoin d’essais contrôlés randomisés de haute qualité qui mesurent également le TSPT complexe, utilisent une approche de traitement modulaire et incluent les traitements recommandés dans les directives du National Institute for health and Care Excellence (NICE) tels que la TCC axée sur le traumatisme et la désensibilisation par les mouvements oculaires (EMDR).
 

Introduction 

 
La prévalence du trouble de stress post-traumatique (TSPT) est environ cinq fois plus élevée au sein de la population carcérale que dans les échantillons communautaires (Baranyi et al., 2018). Non seulement les pris- sonnes atteintes de TSPT présentent souvent d’importants problèmes de santé mentale comorbides, tels que la dépression et l’anxiété, mais ce trouble peut également être associé à une augmentation des problèmes de comportement en détention, tels que la suicidalité et l’agression (Facer-Irwin et al., 2019). Des données suggèrent que le TSPT peut souvent ne pas être identifié et traité en milieu carcéral (Jako- bowitz et al., 2017). La prise de conscience croissante du fardeau que le TSPT et d’autres symptomatologies liées à des traumatismes font peser sur les systèmes de soins de santé en milieu carcéral a conduit à un appel à la mise en œuvre de soins correctionnels tenant compte des traumatismes, qui mettent en évidence les façons dont les facteurs environnementaux de la prison peuvent déclencher ou exacerber un traumatisme antérieur, ou faire courir aux détenus le risque d’un nouveau traumatisme (Branson et al., 2017 ; Fritzon et al., 2020 ; Levenson & Willis, 2018). L’amélioration de l’accès aux interventions fondées sur les traumatismes est au cœur des initiatives de soins tenant compte des traumatismes, Pourtant, le système carcéral pose de réels défis pour la réussite de la prestation du travail axé sur les traumatismes, compte tenu de l’instabilité et de l’imprévisibilité inhérentes à cet environnement (Piper & Berle, 2019).
 
Cinq revues systématiques précédentes ont étudié l’efficacité des thérapies psychologiques, y compris les interventions basées sur les traumatismes, auprès des populations de délinquants (Bartlett et al., 2015 ; Heckman et al., 2007 ; Henderson & Kroese, 2020 ; King, 2015 ; Yoon et al., 2017). Cependant, seules deux de ces revues ont utilisé des techniques de méta-analyse (Bartlett et al., 2015 ; Yoon et al., 2017). En outre, aucune revue précédente n’a exploré les facteurs pertinents au niveau du traitement qui peuvent modérer l’efficacité de ces interventions en milieu carcéral, tels que la modalité de traitement (c’est-à-dire la thérapie individuelle par rapport à la thérapie de groupe), la durée du traitement ou la phase de travail. Les interventions de phase 1 en matière de traumatisme comprennent des interventions axées sur les compétences axées sur le présent qui se concentrent sur la stabilisation des symptômes, tandis que le travail de phase 2 comprend des interventions fondées sur l’exposition ou des interventions cognitives qui facilitent le traitement de la mémoire du traumatisme (McFetridge et al., 2017). Des données communautaires récentes indiquent que les interventions de stabilisation de phase 1 prises isolément ne sont peut-être pas efficaces pour réduire les symptômes du TSPT (Coventry et al., 2020 ; Norman et al., 2019), ce qui soulève des questions quant à savoir si une approche par phase est toujours nécessaire ou même recommandée (De Jongh et al., 2016). Ainsi, une synthèse actualisée des recherches existantes est justifiée afin d’apporter davantage de clarté sur la manière dont les interventions axées sur les traumatismes peuvent être délivrées avec succès dans un environnement où le fardeau de la santé mentale est élevé, mais où les ressources sont faibles. (…)
 

Implications pour la recherche 

 
L’étude des besoins de traitement des détenus souffrant d’un TSPT complexe est une prochaine étape essentielle de la recherche. Il est nécessaire de mener des ECR de bonne qualité sur les interventions fondées sur des données probantes en matière de traumatisme (c.-à-d. TF-CBT et EMDR) en utilisant des groupes de contrôle solides en prison.
 

Implications pour la politique et la pratique

 
Il est recommandé de proposer davantage de thérapies individuelles de traitement des traumatismes en prison, conformément aux initiatives de soins tenant compte des traumatismes. Nous avons constaté une dépendance excessive à l’égard des interventions de stabilisation de phase 1 dispensées par du personnel non qualifié, mais lorsque les interventions de traitement des traumatismes ne sont pas réalisables pour des raisons pratiques ou de sécurité, les interventions de stabilisation peuvent néanmoins être utiles pour réduire les symptômes du TSPT.
 
Un partenariat plus solide entre le système opérationnel des prisons et les prestataires de soins de santé des prisons est essentiel pour une mise en œuvre réussie des interventions axées sur les traumatismes. Les prisons peuvent envisager de maintenir en détention les détenus qui suivent un traitement axé sur le traumatisme, afin de réduire les obstacles thérapeutiques (tels que les transferts ou les conflits d’horaires) qui peuvent augmenter le risque de déstabilisation.
 
 
Lire l’article complet en ligne : L’efficacité des interventions axées sur les traumatismes en milieu carcéral 
 

En savoir plus 


Références de l’article L’efficacité des interventions axées sur les traumatismes en milieu carcéral :

  • auteurs : Malik N, Facer-Irwin E, Dickson H, Bird A, MacManus D.
  • titre en anglais : The Effectiveness of Trauma-Focused Interventions in Prison Settings: A Systematic Review and Meta-Analysis
  • publié dans : Trauma Violence Abuse 2021 Oct 28;15248380211043890.
  • doi: 10.1177/15248380211043890. Online ahead of print.
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