Auto-évaluations des TCA

Mis à jour le 22 août 2023

Dans une revue bibliographique approfondie, S. Chelali (1) a répertorié 71 échelles utilisées pour l’évaluation des TCA, avec 3 types d’outils : les auto-évaluations des TCA (83 %), les interviews standardisées (14 %) et les échelles d’observation directe (2,3 %). Plus de la moitié des outils étaient d’origine anglo-saxonne (66,93 %). Dans cet article, nous vous présentons les principales auto-évaluations des TCA disponibles en français : SCOFF-F, EAT-26, BULIT, EDI, YFAS… Des liens sont disponibles pour vous permettre de faire ces tests en ligne.

Questionnaire SCOFF-F

Le questionnaire SCOFF utilise un acronyme pour faire référence aux cinq principaux points abordés dans le test (Sick, Control, One, Fat, Food). Il a été, conçu en 1999, en Angleterre, par Morgan et al. (2), pour une utilisation par des non-professionnels, pour évaluer la présence éventuelle d’un trouble alimentaire. Au Royaume-Uni, il est couramment employé comme outil de dépistage par les médecins généralistes.

L’objectif des auteurs était de développer un outil fiable, simple et rapide, permettant de repérer les sujets à risque ou atteints de TCA, pour le dépistage et l’utilisation épidémiologique. Le questionnaire SCOFF a été testé et validé dans une population de patientes atteintes de TCA et un groupe contrôle. Sa version française – le SCOFF-F – a été validée en 2008. Ce questionnaire est recommandé par la HAS pour le diagnostic des TCA. Le SCOFF-F a la même validité qu’il soit passé à l’oral ou à l’écrit (3).

Le questionnaire SCOFF est donc un outil simple, rapide et d’interprétation facile, dont les caractéristiques métrologiques sont satisfaisantes, permettant d’établir un diagnostic de TCA. Il ne prend que 30 secondes à compléter.

Le questionnaire est composé de 5 questions dichotomiques.

Un point est attribué pour chaque “oui”. Deux réponses positives sont fortement prédictives d’un trouble du comportement alimentaire.

Faire le test SCOFF-F en ligne

Echelle d’auto-évaluation de l’anorexie mentale – EAT (eating attitude test)

L’EAT est un questionnaire d’auto-évaluation existant sous deux formes : à 40 et à 26 items (4).
C’est un instrument de dépistage élaboré pour l’évaluation des comportements et des attitudes anorexiques. Il évalue le risque de développer un TCA. Le EAT-26 ne permet pas de poser le diagnostic de TCA mais ses 3 critères permettent de déterminer la nécessité ou non d’une prise en charge spécialisé. Ce questionnaire est reconnu pour le dépistage de l’AM et de la BN mais il est limité pour les autres TCA (5).

Il nécessite moins de 5 minutes et peut être fait de façon autonome par le patient ou bien par le praticien ou intervenant scolaire par exemple.

Les domaines explorés sont :

  1. restriction alimentaire (diète alimentaire),
  2. boulimie et préoccupation concernant la nourriture,
  3. contrôle de la prise alimentaire.

Les items sont cotés sur une échelle de Likert en 6 points allant de « Pas du tout/Jamais » à « Extrêmement/Toujours”.

En plus des 26 questions vient s’ajouter la présence d’un faible poids corporel selon l’IMC, et des questions comportementales additionnelles (présence de crises d’hyperphagie, vomissements, utilisations de laxatifs et autres moyens compensatoires).

Le score seuil est de 20. Un score supérieur ou égal à 20 indique un niveau élevé de préoccupation sur les régimes amaigrissants ou comportements alimentaires problématiques. Il est donc recommandé une consultation spécialisée afin de poser le diagnostic ou non. Un score inférieur à 20 est associé à un moindre risque de présenter un TCA, mais n’exclue pas la présence de symptômes cliniques significatifs de ce type de trouble.

Les limites de l’instrument sont notamment les problèmes de sincérité liés à l’auto-évaluation (dénis), ainsi qu’un taux relativement important de faux négatifs. L’EAT est très sensible aux influences culturelles, ce qui rend difficile l’établissement de normes. La sensibilité de l’EAT est modeste, mais peut être améliorée par le recueil d’informations complémentaires notamment concernant le poids et l’humeur.

Faire le test EAT-26 en ligne

EDI (eating disorder inventory)

L’EDI n’est pas un outil de repérage des troubles du comportement alimentaire. Il a été construit pour évaluer des attitudes, des sentiments ou des comportements liés aux conduites alimentaires. Il permet d’estimer la fréquence avec laquelle les sujets s’attribuent d’éventuelles particularités dans les modalités mêmes de l’alimentation (6).

Instrument ancien, bien validé et évolutif, l’EDI peut être considéré comme l’inventaire de référence de base pour l’étude des caractéristiques psychologiques des sujets présentant des troubles du comportement alimentaire.

Il est utilisé pour les hommes et pour les femmes de plus de 12 ans.

L’EDI-2 (7) peut être utilisé dans le cadre du diagnostic initial avant le début de la psychothérapie pour la planification du traitement différencié ou plus tard dans le mesure du changement.

L’EDI-2 comprend 91 items et 11 sous-échelles :

  1. Ascétisme : tendance à atteindre la vertu à travers la poursuite d’idéaux tels que la discipline, le déni, la restriction, le sacrifice et le contrôle de ses propres besoins corporels.
  2. Boulimie : tendance à penser à et à faire des épisodes boulimiques. Les comportements associés, en particulier les vomissements provoqués, font partie de l’échelle.
  3. Conscience intéroceptive : confusion et appréhension à reconnaître les états émotionnels et à y répondre de manière appropriée, ceci concernant également l’identification des sensations de faim et de satiété.
  4. Contrôle des impulsions : tendance à l’impulsivité, aux abus de substances, la prise de risque, l’hostilité, l’autodestruction et la destructivité en matière de relations interpersonnelles.
  5. Désir intense de minceur : préoccupations excessives vis-à-vis du régime et du poids, désir intense d’être plus mince et peur de l’embonpoint.
  6. Inefficacité : sentiments d’inadéquation générale, d’insécurité, de solitude et éprouvé de ne pouvoir être capable de contrôler sa propre vie.
  7. Insatisfaction corporelle : insatisfaction globale concernant les formes corporelles et croyance que certaines parties du corps, les hanches, la poitrine ou les fesses sont trop grosses.
  8. Insécurité sur le plan social : conviction que les relations sociales sont globalement de mauvaise qualité, tendues, incertaines, ingrates et n’apportent que du désappointement.
  9. Méfiance dans les relations interpersonnelles : sentiment général d’aliénation et réticence à nouer des relations intimes.
  10. Perfectionnisme : croyance selon laquelle seuls les niveaux les plus élevés de performances personnelles sont acceptables ; croyance que les autres attendent ces niveaux de la patiente (ou du patient).
  11. Peur de la maturité : désir de revenir à la sécurité de l’enfance face aux craintes vis-à-vis des expériences psychologiques et biologiques associées à un poids d’adulte.

Le questionnaire est composé de  items évalués sur une échelle de Likert en 6 points : « toujours », « habituellement », « souvent », « quelquefois », « rarement », « jamais ».
Suivant que l’item soit direct ou inversé, « toujours » ou « jamais » sont cotés 3, « habituel » 2, « souvent » 1.

Les 3 degrés opposés à la réponse la plus pathologique sont cotés 0. Les items directs où « toujours » = 3, « en général » = 2, « souvent » = 1 et « quelquefois, rarement, jamais » = 0. Les items indirects suivis d’un astérisque où « jamais » = 3, « rarement » = 2, « quelquefois » = 1 et « souvent, en général, toujours » = 0.

L’échelle comporte également des items concernant l’état-civil, le poids actuel, la taille, le poids antérieur le plus bas, le poids antérieur le plus élevé, l’âge de début des problèmes de poids, et le poids idéal perçu par les sujets.

L’auto-questionnaire est rempli en environ 20 minutes.

Faire le test EDI-2 en ligne 

BULIT (bulimia test)

Le BULIT a été développé en 1984 par Smith et Thelen (8) pour l’évaluation des troubles des conduites alimentaires boulimiques en population générale. C’est un autoquestionnaire destiné essentiellement au dépistage des troubles des conduites alimentaires.

Il est constitué de 36 items évaluant les perturbations alimentaires de type boulimique. Chaque item est coté de 1 à 5, en fonction du caractère pathologique du comportement étudié.

Actuellement, seul le score global est pris en compte dans les études. Le score global est la somme de l’ensemble des 32 items (ne sont pas retenus les abus de laxatif, de diurétiques, les données concernant la dernière période menstruelle et la fréquence habituelle des règles). Le score varie entre 32 et 160, avec un premier seuil de 88 définissant des comportements boulimiques occasionnels et un score supérieur ou égal à 102 qui définit des comportements boulimiques authentiques.

Cette échelle est facile à utiliser et à coter mais sa limite est qu’elle ne s’intéresse qu’à un seul type de trouble du comportement alimentaire.

D’autres études doivent venir valider la valeur de cet instrument, dont l’application essentielle reste le dépistage des conduites boulimiques en population non clinique.

YFAS (Yale food addiction scale)

Cette échelle a été traduite et validée en français (9).

La YFAS mesure les symptômes de dépendance à l’alimentation au cours des 12 derniers mois, en adaptant les critères de dépendance aux substances du DSM-IV.

La YFAS permet d’évaluer l’addiction à l’alimentation de deux manières : 1) le nombre de symptômes d’addiction à l’alimentation présents au cours des 12 derniers mois et 2) diagnostic éventuel d’addiction à l’alimentation. La YFAS a été construite de façon à identifier les personnes qui présenteraient des symptômes et un haut risque de dépendance à l’alimentation.

Cette échelle est composée de 25 items (de type Likert ou dichotomiques), basés sur les sept critères de dépendance à une substance du DSM-IV-TR, et se rapportant aux 12 derniers mois :

  1. Tolérance (items 20 et 21)
  2. Sevrage (items 12, 13 et 14)
  3. Substance prise en quantité plus importante ou pendant une durée plus importante que prévue (items 1, 2 et 3).
  4. Désir persistant ou efforts infructueux pour limiter ou arrêter la consummation de la substance (items 4, 22, 24, 25).
  5. Beaucoup de temps passé pour consommer la substance ou pour se remettre de ses effets (items 5, 6 et 7).
  6. Abandon d’activités sociales, professionnelles ou de loisirs (items 8, 9, 10 et 11).
  7. Poursuite de la consommation malgré l’existence de conséquences physiques et/ou psychologiques (item 19). Souffrance marquée : items 15 et 16.

Pour parler d’addiction à l’alimentation, il faut que la personne ait au moins 3 critères sur 7 positifs ET qu’elle remplisse également le critère “souffrance marquée”. Pour qu’un critère soit considéré comme “positif”, il faut qu’au moins un des items du critère ait un score significatif. Les cut-offs de significativité sont les suivants :

  • Items 25 : score significatif si réponse ≥ 5.
  • Items 1, 2, 4 et 6 : score significatif si réponse ≥ 4.
  • Items 3, 5, 7, 9, 12, 13, 14, 15 et 16 : score significatif si réponse ≥ 3.
  • Items 8, 10, 11 : score significatif si réponse ≥ 2.
  • Item 24 : score significatif si réponse est “non”.
  • Items 19, 20, 21, 22 : score significatif si réponse est “oui”.

Les items 17, 18 et 23 ne font pas l’objet de cotation (il s’agit de questions servant d’amorces pour les questions suivantes).

Des outils s’appuyant sur les nouveaux critères du DSM-5 ou de la CIM-11 sont à développer.

Télécharger le test YFAS (critères DSM-IV)

En savoir plus 

Dossier EMDR et TCA (publication du dossier en janvier 2021)

Formation
Le traitement des troubles alimentaires en EMDR
Formation Diagnostic des troubles liés aux séquelles de traumatismes selon la CIM-11

Références de l’article Auto-évaluations des TCA :

  1. Chelali S. (2010) Les échelles et questionnaires d’évaluation des troubles du comportement alimentaire : revue systématique. Diplôme d’état de docteur en médecine, thèse. Rouen : université de Rouen.
  2. J. F. Morgan, F. Reid et J. H. Lacey (1999) « The SCOFF questionnaire: assessment of a new screening tool for eating disorders », BMJ (Clinical research ed.), vol. 319, no 7223,‎ 4 décembre 1999, p. 1467–1468
  3. Haute Autorité de santé. (juin 2010) Anorexie mentale : prise en charge. Recommandations de bonnes pratiques. Disponible sur :
    https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2010-
    09/argu_anorexie_mentale.pdf
  4. Carrot, G., Lang, F., Estour, B., Pellet, J., Gauthey, C., & Wagon, C. (1987). Etude de la EAT: échelle d’auto-évaluation de l’anorexie mentale dans une population témoin et dans une population d’anorectiques. In Annales médico-psychologiques (Vol. 145, No. 3, pp. 258-264). Elsevier.
  5. Orbitello, B., et al., (2006) The EAT-26 as screening instrument for clinical nutrition unit attenders. Int J Obes (Lond).
  6. CRIQUILLION-DOUBLET S., DIVAC S., DARDENNES R., GUELFIJ.D. (1995) Le « Eating Disorder Inventory » (EDI). In. J.D. Guelfi, V. Gaillac et R. Dardennes Psychopathologie quantitative. Masson, Paris, 249-260.
  7. Garner, D.M. (1991). EDI 2 : Eating Disorder Inventory 2. Professional Manuel. Psychology Assessment Resources. P.O. Box 998 Odessa Florida 33556 USA.
  8. Smith, M. C., & Thelen, M. H. (1984). Development and validation of a test for bulimia. Journal of Consulting and Clinical Psychology, 52(5), 863–872. https://doi.org/10.1037/0022-006X.52.5.863
  9. Brunault P, Ballon N, Gaillard P, Réveillère C, Courtois R. (2014) Validation of the French version of the Yale Food Addiction Scale: an examination of its factor structure, reliability, and construct validity in a nonclinical sample. Canadian Journal of Psychiatry. 2014;59(5):276–284
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